Tant qu'il y aura des cabanes au fond des bois
rien ne sera tout à fait perdu
Sylvain Tesson
Il était une fois un bestiaire fantastique dans un bois où conduisent de profondes ornières. Une multitude d’animaux d’ici et d’ailleurs, et des personnages facétieux, sculptés entièrement à la tronçonneuse, entourent les cabanes du bûcheron qui a créé ce lieu magique, en sous bois parmi les rochers. Perché sur un dôme de granit, un loup d'un bois ocre vif domine un lacis de sentiers où les plus anciennes sculptures sont recouvertes de lichen, finissant par disparaître aux yeux non initiés avant de retourner à la nature..
Au détour du chemin un gnome très gris dans l’ombre verte avertit que vous arrivez dans cet univers gardé secret. Ambiance saisissante où vous reviennent les forêts de Sibérie de Sylvain Tesson, la vie dans les bois de David Thoreau...et de plus loin, gardés plus profond encore, les contes de fées avec les enfants perdus dans les forêts. On s’attend à trois bols de soupe à l’intérieur de la cabane où grimpent des ours et des oursons dont plusieurs soutiennent le toit. Mais d’un coup d’œil à l’intérieur on n’aperçoit que des étagères remplies de livres, qui ont gardé les courbes prononcées des troncs évidés dont elles sont issues
Les étagères n’hésitent pas à traverser les murs des cabanes pour pousser dehors une tête d’animal. Ainsi la girafe rejoint un éléphant, et
aperçoit le dromadaire qui nous rapproche du jardin zen où s’enfonce un élan. Plus loin les animaux de la terre et des océans voisinent avec l’évocation de tableaux de maîtres, sans plus de de
peinture. Exceptions vivement colorées dans cet univers de rondins sculptés au naturel, voici un Carambar avec un Mi-Cho-Ko, clin d’œil enfantin au détour d’un sentier. Et en toute modestie,
discrètement à part, accrochées en tous sens à un tronc d'arbre qui en est recouvert, les coupes gagnées par le champion de course en montagne. Casser les codes, mieux qu'un art à la Duchamp, un
art de vivre.
Comme on resterait bien là, séparé du monde, voilà la tentation des fauteuils, certains tout simples dans un design d’Afrique Noire, d’autres imposants comme celui qui invite à contempler les nénuphars sur un plan d’eau dissimulé de loin par les herbes folles, à la fois vide et plein. Le plus majestueux, devant l’antre de l’artiste forestier, porte implantées dans ses larges bras des pousses d’arbre choisies comme fidèle compagnie. C'est le plus beau fauteuil qu’on puisse imaginer, pour contempler la clairière dans ses jeux lumière. Dans l’ombre douce toute proche Pinocchio sort en silence de la tronçonneuse de Gepetto.
Quelques sculptures échappées de ce bestiaire - un bouquetin bondissant, un écureuil de la rousseur du pin sylvestre - m'ont guidée vers le lieu magique des
cabanes, dans la clairière cernée d'une multitude d'animaux sortant du bois. Une ambiance prenante, un univers unique et précieux à l'écart du monde.
Extra-ordinaire.
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